Christchurch prépare les sépultures des victimes de l'attentat

GLOBE ÉCHOS | 18/03/19 00:54

Des dizaines de tombes étaient en cours de préparation lundi matin au cimetière de Christchurch pour accueillir les dépouilles des 50 fidèles tués vendredi dans l'attaque contre deux mosquées de la ville néo-zélandaise, alors que les familles réclament la restitution des corps de leurs proches.

La coutume musulmane prévoit en effet l'inhumation du corps dans les 24 heures suivant le décès. Les médecins légistes ont dit espérer être en mesure de satisfaire les familles rapidement, tout en soulignant qu'ils devaient procéder avec précaution dans leur enquête sur le massacre.

"On fait un scan de tous les défunts, leurs empreintes sont relevées, on retire les objets qu'ils portaient ou avaient sur eux", a expliqué la médecin-légiste en chef Deborah Marshall, qui dirige l'enquête.

La Première ministre Jacinda Ardern a annoncé dimanche que les dépouilles seraient restituées d'ici mercredi.

Un journaliste de l'AFP a vu des ouvriers et des tractopelles à l'oeuvre lundi matin dans le cimetière de Christchurch, sans que l'on sache encore exactement quand auront lieu les premières funérailles.

Alors que la Nouvelle-Zélande essaye encore de comprendre comment le pire massacre de musulmans dans un pays occidental de l'histoire récente a pu se produire dans ce pays réputé paisible, des exemples d'actes d'héroïsme ou de pardon ont fait surface.

- "Pardon, générosité, amour" -

Farid Ahmad, qui a perdu son épouse Husna, 44 ans, tuée alors qu'elle aidait à sauver des fidèles, se refuse ainsi à sombrer dans la haine à l'égard du suspect Brenton Tarrant, un "fasciste" autoproclamé qui a expliqué ce massacre et les deux années de sa préparation dans un long "manifeste" islamophobe de 74 pages.

Husna fait partie des quatre femmes figurant parmi les victimes âgées de 3 à 77 ans, selon une liste encore incomplète. Plusieurs victimes étaient natives de la région mais plusieurs autres étaient des immigrés originaires de pays éloignés comme l'Egypte ou la Jordanie.

A la question de savoir s'il pardonnait au tueur, Farid Ahmad a répondu: "Bien sûr. La meilleure chose, c'est le pardon, la générosité, l'amour et l'affection".

Mme Ardern a révélé dimanche que son cabinet avait reçu ce "manifeste" neuf minutes avant le début du carnage. "Il n'incluait aucun lieu ni aucun détail spécifique", a-t-elle dit, ajoutant que le document avait été aussitôt transmis aux services de sécurité.

Les hommages émouvants à la mémoire des victimes se sont multipliés à Christchurch, en Nouvelle-Zélande et dans le monde entier.

"Nous nous tenons aux côtés de nos frères et sœurs musulmans", peut-on lire sur une grande banderole près d'un des sites de la ville où s'empilent des fleurs dans un mémorial improvisé.

- Elan de solidarité -

Un haka, une danse traditionnelle maorie, a été exécutée dimanche avec beaucoup d'émotion par un gang de motocyclistes néo-zélandais en hommage aux victimes de l'attaque commise par Brenton Tarrant, extrémiste de droite australien de 28 ans qui, lors de son inculpation samedi, a fait de la main un signe de reconnaissance des suprémacistes blancs.

Dans tout le pays, un élan de solidarité interconfessionnelle a été observé, avec notamment des millions de dollars de dons et des achats de nourriture halal destinés aux victimes.

Les autorités ont également indiqué que 34 blessés demeuraient hospitalisés. Parmi eux, la petite Alin Alsati, quatre ans, entre la vie et la mort, après avoir été touchée par au moins trois balles alors qu'elle se trouvait avec son père dans la mosquée al-Nour. Son père jordanien, également blessé, avait récemment émigré en Nouvelle-Zélande.

Le nombre de morts aurait pu être encore plus élevé s'il n'y avait pas eu des actes d'héroïsme comme celui d'Abdul Aziz, un Australien d'origine afghane qui était avec ses quatre enfants dans la mosquée de Linwood quand il s'est précipité vers le tireur.

- Réseaux sociaux sur la sellette -

Après avoir entendu un de ses fils lui crier de se mettre à l'abri dans la mosquée, Abdul s'est emparé d'un fusil vide laissé par le tueur en lui criant plusieurs fois "Viens par ici!" dans le but de l'éloigner de la mosquée.

"Je voulais juste sauver autant de vies que possible, quitte à perdre la mienne", a-t-il dit à l'AFP. Abdul Aziz a continué à poursuivre le tireur qui s'enfuyait en voiture avant d'être interpellé.

Cette tragédie a provoqué une onde de choc en Nouvelle-Zélande, pays de cinq millions d'habitants dont 1% se disent musulmans, réputé pour sa tradition d'accueil.

Mme Ardern doit réunir lundi son cabinet pour discuter d'un éventuel durcissement des législations sur les armes. Elle exige aussi des réponses des réseaux sociaux, où le massacre a été retransmis en direct.

Le gouvernement doit également prendre connaissance des conclusions des services de renseignement sur la façon dont un Australien ne cachant pas ses sympathies fascistes a pu se procurer un tel arsenal d'armes sans attirer l'attention des autorités.

Après une foule d'avertissements officiels sur le niveau de sécurité, la police a finalement appelé les Néo-Zélandais à reprendre leurs activités normales, même si la tension reste encore palpable dans l'archipel.

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