Washington oblige Boeing à modifier les 737 MAX mais sans les immobiliser

GLOBE ÉCHOS | 12/03/19 00:37

Les Etats-Unis vont obliger Boeing à procéder à des modifications du 737 MAX 8 et du 737 MAX 9 mais ne vont pas clouer ces avions au sol, prenant le contrepied de pays comme la Chine, après l'accident mortel d'un appareil de ce type dimanche en Ethiopie.

L'agence fédérale de l'aviation (FAA), un des principaux régulateurs du transport aérien, a demandé lundi à l'avionneur américain d'effectuer les changements requis "au plus tard en avril".

Ces modifications portent sur des logiciels et le système de contrôle MCAS conçus pour éviter les décrochages de ces avions. Boeing doit également actualiser le manuel destiné à la formation des pilotes.

"Si nous identifions un problème affectant la sécurité, la FAA prendra des mesures immédiates et appropriées", a répété lundi soir le régulateur aérien.

Les autorités américaines se distinguent de la Corée du sud, de l'Indonésie et surtout de la Chine, grosse cliente du 737 MAX 8, qui ont décidé d'immobiliser ces avions.

Lors des quarante dernières années, Washington n'a cloué au sol toute une flotte d'avions qu'en deux occasions. La dernière fois remonte à janvier 2013, lorsque les appareils 787 Dreamliner de Boeing avaient été immobilisés après des problèmes de batteries.

- Outil de négociations -

Un 737 MAX 8 de la compagnie Ethiopian Airlines s'est écrasé dimanche au sud-est d'Addis Abeba peu après le décollage, tuant les 157 passagers et membres d'équipage.

Le ou les scénarios de l'accident devraient être rapidement connus, les deux boîtes noires de l'appareil d'Ethiopian Airlines - celle contenant les données techniques du vol et celle enregistrant les discussions et les alarmes dans le cockpit - ayant été retrouvées lundi sur le lieu de la tragédie.

Cet accident, survenu moins de cinq mois après celui d'un avion du même modèle de la compagnie indonésienne Lion Air, a provoqué des inquiétudes chez les investisseurs. Le titre Boeing a perdu 5,36% à Wall Street.

Il est particulièrement rare qu'un nouveau modèle enregistre deux accidents mortels en peu de temps.

A la suite de l'accident de dimanche, Ethiopian Airlines a immobilisé ses quatre autres Boeing 737 MAX 8. Les compagnies Cayman Airways (îles Caïmans) et Comair (Afrique du Sud) ont fait de même.

D'autres transporteurs dont FlyDubai, Norwegian, Icelandair, Southwest, American Airlines et Air Canada, continuent pour l'heure de faire voler leurs 737 MAX 8.

Les causes des accidents de ces appareils, dont le moteur est plus gros que dans les vieux 737 NG, ne sont pas connues mais l'accident de Lion Air avait braqué les projecteurs sur les capteurs d'incidence (AOA, Angle of Attack sensor), dont un dysfonctionnement peut conduire l'ordinateur de bord, pensant être en décrochage, à mettre l'appareil en piqué alors qu'il faudrait au contraire le redresser.

L'immobilisation totale des 737 MAX 8 aurait été un gros revers pour Boeing: non seulement ils sont la locomotive des ventes et des bénéfices, mais 350 exemplaires de cet avion, entré en service en mai 2017, volent actuellement.

Les conséquences économiques seraient d'autant plus importantes que le constructeur aéronautique emploie plus de 150.000 personnes aux Etats-Unis et a des usines à Washington (ouest) et en Caroline du Sud.

"Boeing est stratégique. C'est un outil de commerce", souligne Michel Merluzeau, expert chez AirInsight.

Le 737 MAX fait partie des négociations commerciales en cours entre les Etats-Unis et la Chine, Washington poussant Pékin à passer de nouvelles commandes pour rééquilibrer les échanges commerciaux entre les deux premières économies mondiales, selon la presse américaine.

- Deuil national -

Le vol ET 302, qui avait décollé dimanche à 08H38 (05H38 GMT) d'Addis Abeba, a disparu des radars six minutes plus tard. Selon un témoin, Tegegn Dechasa, l'arrière de "l'avion était déjà en feu lorsqu'il s'est écrasé au sol".

L'avion a été pulvérisé lors de l'impact.

Les enquêteurs de l'Agence éthiopienne de l'aviation civile ont été rejoints par une équipe technique de Boeing et des enquêteurs américains des autorités de l'aviation civile.

Une journée de deuil national a été décrétée lundi en Ethiopie.

Le Kenya était doublement endeuillé. Avec 32 ressortissants à bord, c'est le pays le plus touché par la tragédie, et Nairobi est par ailleurs le hub régional des Nations unies, durement affectées par la catastrophe.

Plusieurs délégués devant participer à la conférence annuelle du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE), qui s'est ouverte lundi à Nairobi, se trouvaient à bord de l'avion.

Parmi les victimes onusiennes figurent six employés du PNUE, sept du Programme alimentaire mondial (PAM) et plusieurs du Haut-commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR).

Les victimes du crash étaient de 35 nationalités différentes, selon des chiffres provisoires de la compagnie aérienne. Celle-ci a notamment dénombré 32 Kényans, 18 Canadiens, 9 Ethiopiens, 8 Italiens, 8 Chinois, 8 Américains, 7 Français, 7 Britanniques, 6 Egyptiens, 5 Allemands et 4 Indiens.

Les gouvernements français et britannique ont cependant fait état de la mort de neuf de leurs ressortissants.

Parmi les victimes figurent l'épouse et les deux enfants du député slovaque Anton Hrnko, un archéologue italien, un professeur d'université canadien d'origine nigériane, ainsi qu'un ancien secrétaire général de la fédération kényane de football.

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