Après plusieurs démissions, Theresa May sort la menace d'un non Brexit

GLOBE ÉCHOS | 15/11/18 13:18

Ebranlée par des démissions en série de son gouvernement, la Première ministre Theresa May a averti jeudi les députés britanniques qu'ils avaient le choix entre soutenir son projet d'accord de divorce conclu avec l'Union européenne ou risquer une sortie sans accord, voire pas de Brexit du tout.

"Le choix est clair: nous pouvons choisir de partir sans accord, risquer qu'il n'y ait pas de Brexit du tout ou choisir de nous unir et soutenir le meilleur accord que nous pouvions négocier, cet accord", a dit Mme May, défendant le texte de près de 600 pages que quatre membres de son gouvernement ont refusé d'endosser, choisissant de claquer la porte.

L'hypothèse d'un non Brexit pourrait se concrétiser en cas de tenue d'un second référendum, dont l'idée a gagné du terrain ces derniers mois, et qui renverserait le résultat de la consultation de juin 2016. Mme May est fermement opposée à la tenue d'un tel référendum.

Le ministre du Brexit Dominic Raab, la secrétaire d'Etat du Brexit Suella Braverman, Shailesh Vara le secrétaire d'Etat à l'Irlande du Nord, province britannique dont le sort est au coeur du problème, ainsi que la ministre du Travail Esther McVey, ont démissionné jeudi avec fracas.

"Je ne peux soutenir l'accord proposé pour deux raisons", liées notamment au futur statut de l'Irlande du Nord après le Brexit, s'est justifié l'eurosceptique Dominic Raab dans sa lettre de démission .

Le compromis prévoit un "filet de sécurité" ("backstop" en anglais), solution de dernier recours prévoyant le maintien de l'ensemble du Royaume-Uni dans une union douanière avec l'UE ainsi qu'un alignement réglementaire plus poussé pour l'Irlande du Nord, si aucun accord sur la future relation entre Bruxelles et Londres n'était conclu à l'issue d'une période de transition de 21 mois prévue après le Brexit, le 29 mars 2019, et prolongeable une fois.

"Le régime réglementaire proposé pour l'Irlande du Nord présente une menace très réelle pour l'intégrité du Royaume-Uni", a expliqué Dominic Raab, qui s'oppose également à un backstop "de durée indéfinie".

Mais Mme May a fait valoir qu'aucun accord avec Bruxelles ne serait possible sans cette assurance. "L'UE ne négociera aucun partenariat futur sans elle", a-elle dit aux députés.

- Gouvernement d'unité nationale -

L'ex-chef du parti europhobe Nigel Farage, l'un des principaux artisans du Brexit, a salué la défection de M. Raab. "Bravo Dominic Raab, encore quelques autres (démissions) et nous serons débarrassés de cette hypocrite Première ministre", a-t-il twitté.

Son départ risque en effet de conforter les partisans d'une sortie sans accord avec l'UE, qui seraient en train de rassembler leurs forces pour réclamer un vote de défiance contre Theresa May, selon les médias.

Le projet d'accord doit encore être voté en décembre par les parlementaires, une fois entériné lors d'un sommet européen le 25 novembre à Bruxelles. Une tâche loin d'être gagnée d'avance au vu des divisions de son Parti conservateur et des sévères réserves exprimées par son allié, le petit parti unioniste nord-irlandais DUP, dont l'appoint est indispensable pour avoir une majorité absolue. Quant au Parti travailliste, il a laissé entendre qu'il ne voterait pas le texte.

La livre sterling a chuté après l'annonce de la démission de Dominic Raab. Vers 10H00 GMT, une livre valait 1,2777 dollar, son plus bas depuis le début du mois, contre 1,2992 dollar mercredi soir vers 22H00 GMT, soit une baisse d'environ 1,5%.

"Il semble que la livre soit désormais un baromètre de la capacité de la Première ministre à conserver son poste", a jugé James Hughes, analyste pour Axitrader.

"La démission de Dominic Raab marque la fin du projet d'accord de la Première ministre", a estimé la députée europhile conservatrice Anna Soubry, pour qui Mme May doit maintenant envisager de partir. "Nous avons besoin d'un gouvernement d'unité nationale, et nous en avons besoin maintenant", a-telle ajouté sur Twitter.

La chancelière allemande Angela Merkel s'est dite "très contente" qu'un accord ait été trouvé. Le Premier ministre français Édouard Philippe a jugé que le projet d'accord était "un grand pas" mais que des "inquiétudes" demeuraient sur son adoption finale, notamment en raison de "l'actualité politique britannique".

Le président du Conseil européen Donald Tusk a lui annoncé un calendrier serré jusqu'à la tenue d'un sommet le 25 novembre pour signer le texte. "Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour que cet adieu soit le moins douloureux possible", a-t-il déclaré.

Parallèlement, la Commission devait continuer de discuter avec le Royaume-Uni de la déclaration politique sur la future relation entre Londres et l'UE qui doit accompagner l'accord de retrait.

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